Par Cynthia Macri.
La première ligne suffira à happer n’importe quel lecteur, avisé ou non, de théâtre. Cette pièce vous fera chavirer au rythme des personnages et de leurs personnalités marquantes, alors installez-vous confortablement dans un fauteuil et préparez-vous à un voyage fantasmagorique au pays de la fourberie.
Catherine Gil Alcala, l’auteure de cette curieuse pièce de théâtre, nous conte ici l’histoire d’un roi aux oreilles d’âne décollées ordonnant l’assassinat de la reine des oiseaux, sa femme, afin d’épouser sa maîtresse déjà enceinte de lui. La reine déchue servira de repas de noces aux convives, mais, avant d’être rôtie, sa tête maudit toutes les personnes qui en mangeront à la damnation.
Artiste pluridisciplinaire, Catherine Gil Alcala fait du rêve et de la folie ses thèmes de prédilection. Auteure de plusieurs pièces de théâtre parues aux éditions La Maison Brûlée, parmi lesquelles James Joyce fuit…lorsqu’un homme sait tout à coup quelque chose, Catherine Gil Alcala manie aussi bien la poésie comme en témoigne La Foule divinatoire des rêves paru il y a deux ans. Elle sait également offrir des performances de ses oeuvres, qu’elles soient musicales ou non, comme en atteste l’une de ses installations/performances les plus connues, Doll’art ou les Épopées de Pimpesouée, présentée dans plusieurs manifestations de l’Hexagone comme le Festival Fou et le Festival Meuf’elle. Prolifique, Catherine Gil Alcala compte à son actif sept spectacles (comptant plus d’une centaine de représentations) en plus de ses ouvrages, dont La Tragédie de l’Âne suivi de Les Farces Philosophiques, publié en 2018, un univers étrange, empreint d’un absurde semblant tout droit sorti d’un rêve, ou d’un cauchemar, dans lequel vous n’aurez pas de mal à vous plonger, le temps d’une heure, d’un instant qui ne vous laissera pas indifférent.
« Le destin t’a planté des oreilles d’âne, roi pauvre pitre ! […] Ton fils sera un pauvre maudit, une étoile filante, un nouveau-né tourmenté qui franchira les frontières de l’Enfer pour hanter la terre ! », La Tragédie de l’Âne
Il ne faut d’ailleurs pas prendre le terme tragique comme un sentiment, qui éveillera en vous la compassion envers le roi aux oreilles d’âne décollées, mais davantage au sens grec de celui-ci. Il fait référence aux pièces de théâtre de l’antiquité (Antigone ou Œdipe roi de Sophocle, pour ne citer que les plus connues), dans lesquelles les personnages vivent un destin terrible, sur fond de violentes péripéties. La référence à Shakespeare est également inévitable, le dramaturge ayant lui-même travaillé ce genre théâtral. Une revisite d’un thème classique donc, mais aux accents surréalistes, dans une histoire captivante.
Les farces philosophiques quant à elles, nous feront suivre l’histoire de la géante à la narine de catin, la petite fille aux allumettes, ou encore la Mort. Dix-huit piécettes qui suivent indéniablement la même route que la pièce de théâtre : des rencontres improbables aux dialogues qui demanderont sans doute aux non-initiés à ce genre littéraire de s’y reprendre à deux fois, afin d’en comprendre tout le sens.
« Je meurs de tous ces morts éternels que j’ai portés sur le dos ! », Les farces philosophiques ; Un petit homme plein de joie, un philanthrope, assomme la mort qui passe sans le voir.
Si vous souhaitez être dépaysé le temps d’une lecture théâtrale et philosophique, sautez sur l’occasion de lire La tragédie de l’Âne, suivi de Les Farces Philosophiques, aux Éditions la Maison Brûlée.
