La flamme qui chante

Par Luc Loiseaux.

Je suis la flamme qui chante et si tu désires être délivré vivant, écoute bien la voix qui danse en ma lumière.
Observe en ma matière l’acidité où tremble et irradie un parfum de sépulcre comme l’écume en feu sur l’arête des mers.
Bientôt dans la poix noire et le sel vif brûlé, tu chercheras la resplendeur, la merveilleuse lucidité de la sablonnière.
Où le château de l’enfance s’élève, où chante le merle de Jean et où la nuée noire vient de la combustion des fers.

Je suis la flamme qui chante et si tu désires être délivré vivant, creuse bien lentement tout au pied du serpent.
Là est cachée l’éclipse du soleil et que tu verras morte mais qui ne l’est pas car elle est bel et bien privée de sa forme.
Alors tu la réveilleras en la couvrant d’argent vif et noir et dépuré de son soufre et tu découvriras l’étendue du firmament.
Car pour le saisir il faut perdre l’âme de son corps et puis la regagner car elle est la clé ouvrant sur l’aériforme.

Je suis la flamme qui chante et si tu désires être délivré vivant, tu dois suivre Hermès qui te veut noir et sur le bon chemin.
Ne craint ni l’éclipse, ni la tête de corbeau car elle fait la séparation du pur et de l’impur et en grande sagesse.
Sous le rideau du sépulcre tu ne sentiras rien car la mort n’est pas sensible à l’odorat ainsi que la terre au jasmin.
Hermès te montre le serpent enroulé sur la verge d’or que porte la notre Dame, en sa grande largesse.

Je suis la flamme qui chante et si tu désires être délivré vivant, gagne vite Mercure mais n’oublies pas de souf(f)rir.
Autrement, tu serais calciné et ainsi décomposé, il te faudrait retourner à tes premières chauffes.
Et lorsque tu obtiens enfin l’oeuf vitriolé, tu sauras que ton Vers est presqu’achevé, ne laisse rien refroidir.
Car passé cet octroi le sentier du souffre rouge tu gagneras au bout duquel l’on boit l’élixir, sauf.

Si tu n’as pas écouté mon chant Lustral, car au bout du sentier, la femme aux longs cheveux mouvants comme les flammes.
T’attends et sur elle ondoie la grande salamandre salée, incombustible et fixe qui garde sa nature dans l’acier calciné.
Prends garde à la femme violette car elle est métallique et dans ses yeux réside la semence des âmes.
Prends ses lèvres brûlantes et gagnez avec elle le grand volcan de la calcination et ton corps adjustible sera bien suranné.

Je suis la flamme qui chante et si tu désires être délivré vivant, remplace ton feu par de l’eau ardente.
A la matière inerte elle en est le secret, la force créatrice et le rayon igné, impérissable et fier.
Pour gagner l’eau ardente chère au père des Lumières, gagne bien la patience, c’est la plus confidente.
De toutes les misères que la matière simple et le temps disgracieux imposent encore à hier.

Je suis la flamme qui chante et si tu désires être délivré vivant, sur les livres de pierre, accorde bien ton oeil.
Puis en mille six cent douze, viens naviguer en paix sur cette eau primitive et céleste et qui s’exprime.
En sept lettres seulement et  sept cloches face à l’être humain : dis lui que tu l’aime ne lui dis pas que tu consultes le grand livre, ce vieil oeil
Je lui dis; derrière un pupitre, l’expression Spagyrique vient faire un sens au fond de ces grands yeux, contraires à la pantomime.


Une contribution de Luc Loiseaux | Luc Loiseaux est amoureux de l’imaginaire sous toutes ses formes. Auteur de romans, de nouvelles et de chansons, il exprime sa vision de la beauté au travers de la littérature, de la poésie, mais aussi de la photographie et de la musique dans l’idée de composer un univers où se côtoient le romantisme, le rêve, les symboles et l’invisible.