Dans les lacis des arbres

Par Erick Gaussens (Hillwater)

« L’arbre et l’ami »

Tournées vers le ciel,

branches en offrande,

calice sans vermeil,

berceau de légendes.

Ce baldaquin de feuilles,

au vert insistant,

en son sein recueille

les confessions du vent.

L’arbre bienveillant

accueille les rêves,

et les rires chantant,

puis tout devient sève.

D’un côté du lierre

de l’autre il est nu.

Devant la terre entière

il assume sa tenue.

Il existe, il est là

a nul autre pareil,

prends le dans tes bras,

écoute ses conseils.

Alors, mon ami, tu verras,

quand grandiront les ombres,

ton âme se calmera

loin des nuages sombres.

« L’arbre et l’eau : sensations »

entrelac apaisant

feuilles et branches

s’épanchent

lac verdoyant

l’eau scintille

brille

sous le vent frémit

endormie

touffu vert

branches noires

ciel au travers

en miroir

sfumato

intranquille

reflets dans l’eau

si fragiles

caresse du vent

sur l’étang

nouvelle image

sous l’ombrage

s’asseoir bien sages

et regarder

ce paysage

sans se lasser

jour de soleil

nous étions deux

cœur en éveil

au fond des yeux

« L’arbre et la grille, anadiplose »

les racines profondes comme des doigts musclés

doigts musclés qui étreignent la peau de la terre

la belle terre qui partage milles vies en son sein 

ce sein où l’arbre centenaire vient puiser sa sève

la sève coule des ténèbres au ciel des frondaisons

frondaisons indociles quand le printemps s’anime

s’anime d’une brise sur les feuilles et bourgeons

bourgeons où poussent les rêves des arbres à venir

Avenir incertain sans la main d’hommes sages 

sages qui choisissent un compromis bienveillant

veillant à faire un doux pont de grille aux racines

racines qui ne seront jamais frappées d’alignement

Frappés d’alignement les arbres, les fleurs et les poètes

les poètes en rient, embrassent les arbres, respirent les fleurs

fleurs fragiles ou sauvages que d’aucun croit sans pudeur

la pudeur qu’ils invoquent  plutôt que d’écouter leur cœur.

« Les racines et la petite fille »

Sous la terre :

c’est la vie,

Un arbre à l’envers

s’y épanouit.

Là-haut la ramure

vert radieux,

s’abreuve à l’azur

généreux.

Racines et radicelles,

branches et rameaux,

dansent, vive ribambelle,

pour te rendre plus beau,

toi l’arbre centenaire

et ta crinière printanière.

C’est le printemps nouveau :

les feuilles sont de sortie,

les fleurs, les oiseaux,

et les petites filles aussi.

Une fillette, justement,

dans tes bras cachée,

s’échappe en riant

de t’avoir joué.

Insouciante gamine

un peu effrontée,

elle saute tes racines

à cloche pied.

Mais tu trembles un peu,

de l’attendrissement ?

la gamine et son jeu ?

non, 

tu dis : ce n’est que le vent.

« L’arbre et la lyre, fantaisie alexandrine »

J’aurais pu inventer foule de ritournelles,

qui auraient fait sourire milles jouvencelles,

si cette branche comme lyre dessinée,

avait accepté sa nouvelle destinée.

Observer dans la brise chanter les roseaux,

puis délicatement avec un doux pinceau,

tracer sept cordes souples et bien ajustées,

le vent les fait vibrer, voila le tour est joué.

De cette rêverie, l’arbre n’a pas voulu.

Un poète saltimbanque jamais il ne fut.

Il se sent vénérable, se croit estimé,

voit sa vie décliner, et ne veux plus jouer

Mais moi je suis libre, tant pis pour ce  barbon,

dit la jeune fille en quête de chansons,

au creux de la branche alors elle bondit

et la musique s’envole en belle mélodie.

Moi qui regardais j’ai vu les feuilles danser,

et le vieillard fredonner, je vous le promet.

Peut être sous cette écorce lisse et nue,

la sève du printemps soudain est revenue.


Une contribution d’Erick Gaussens (Hillwater) | Pendant quelques décennies, après des études approfondies en Mathématiques, Erick Gaussens se tourne vers des activités de créateur d’entreprises au service de la « Recherche et Développement » de différentes industries. Il n’a pour autant jamais cessé d’être aussi poète, musicien, photographe. Depuis plusieurs années, il collecte des mots, des sons, des images. Il mélange et fait dialoguer, en les télescopant, ces nourritures terrestres qu’il a glanées au fil de ses voyages, de ses rencontres, de ses découvertes. Un univers sensible naît de ces correspondances et invite a déambuler au fil des textes, dans le silence de la contemplation, de poèmes en fragments visuels, de sensations en émotions, au détour de paysages, de la beauté naturelle ou du quotidien, vers une évocation réinventée du monde qui nous entoure. Autant de variations où l’imaginaire voyage, autant de portes entrebâillées qui s’ouvrent pour y puiser à notre tour de nouvelles sources d’inspiration.